jeudi 18 décembre 2008

au revoir Colette






Lors de ma dernière intervention sur Paris à l'ISM, Colette Lelandais, responsable relations clientèle intra entreprise, m'a appris son départ à la retraite, à la fois ravie du temps libre à venir et mélancolique de ces 30 ans de collaboration, de gentillesse et d'échanges.

Alors chouette retraite à vous Colette et je suis sûre que vous avez fait le plein de créativité pour toutes les heureuses choses dont vous pourrez maintenant profiter pleinement.
Et cette fleur du peintre Michael Mew pour vous.

mercredi 17 décembre 2008

Bourdieu : les jugements de goût

Bourdieu : les jugements de goût
Vidéo envoyée par LunaticJB

Entretien avec Pierre Bourdieu, issu du DVD « Penseurs de notre temps »

http://blog.bafouillages.net

Suite à une remarque judicieuse de Rémy concernant mes questionnements de consigne face aux productions esthétiques obtenues (post "du résultat plastique à la réflexion pédagogique"), je mets Pierre Bourdieu sur le tapis de discussion pédagogique : finalement est-ce que le rôle du formateur ne se résume pas tout simplement à aider le décryptage des codes du capital culturel incorporé et à accompagner ce travail d'incorporation (d'où la nécessité de temps de la méthode active)?

Oui, bon je jargonne. Alors d'après ce que j'ai compris, Pierre Bourdieu soutient qu'un individu se définit dans le "champ" d'une classe sociale selon non seulement son capital économique (seul influence selon les "déterministes") mais aussi son capital culturel. Pour lui, ce capital culturel se manifeste à travers 3 états :

- l'état incorporé, c'est à dire la manière dont l'individu s'est imprégné de la culture environnante (inconsciemment selon son contexte familial, capital de départ, et consciemment selon le temps investi, notamment mis à disposition par cette même famille, dans son travail d'incorporation). Cet état sera d'autant plus efficace qu'il aura été précoce et durable et fait parti de ce que Bourdieu appelle "l'habitus".

- l'état objectivé qui correspond à la possession de biens culturels, au sens matériel (par exemple, que ce soit la propriété d'un tableau ou la possibilité d'accéder à une exposition de ce tableau) . Cet état nécessite tout de même une appropriation symbolique spécifique pour pouvoir la comprendre, il est donc le résultat de la capitalisation culturel mais aussi économique.

- l'état institutionnalisé soit la "matérialisation" du capital culturel à travers les titres scolaires qui nécessitent un investissement en temps et en efforts et permettent de convertir ce capital culturel en capital économique sur le marché du travail.

Donc pour revenir à mes moutons pédagogiques, il me semble qu'il y a là matière à se positionner pour le formateur dans plusieurs registres : sa posture ( et pas seulement dans la notion de lutte des classes, je vois d'ici venir les canaillous me taxant de gauchiste), ses évaluations et plus particulièrement l'évaluation diagnostique en lien avec cette histoire de capital culturel incorporé que je relirais bien aux notions de représentations initiales (je peux faire des liens aussi entre l'évaluation sommative et l'état institutionnalisé du capital culturel...), ses choix de progression pédagogique selon le temps nécessaire à l'incorporation, etc.

J'y vois aussi une notion qui me tiens à coeur en tant qu'ex designer industriel et aussi formatrice en créativité, le travail que j'ai à faire avec les apprenants sur la notion de goût et des choix esthétiques surtout quand on cible une clientèle différente de soi. C'est une évidence en apparence pour tous les stagiaires (en cap métiers de bouche comme en école de commerce) que je croise que d'utiliser les codes de la cible mais les faits me montrent que cet "habitus" dont Bourdieu parle, fausse la donne dès le départ. Aussi mon travail est moins de relever la part d'à priori que de mettre en évidence le fonctionnement de ce rouage pour à minima le rendre conscient dans sa complexité, même sans les gros mots, même sans frimer avec Bourdieu.

vendredi 12 décembre 2008

précisions

A la suite du post "amis ifradiens", Jean-Marie Gaudin, responsable Formation et VAE de la MI, me demande d'apporter quelques précisions. Je le cite : "En fait la formation de formateur "dort" en Pays de la Loire cette année mais elle est active en Guadeloupe et revivra (nous l'espérons !) à Angers l'an prochain. De plus, le dispositif modulaire va être proposé début 2009. Je crois que ce serait bien que les gens qui te visitent aient cette info."
En effet, voilà chose faite!

lundi 8 décembre 2008

réactions en chaîne




Merci à Annette, qui fut la première ifradienne à répondre à mon invitation en m'envoyant ces photos surprenantes (cliquez sur l'image pour zoomer!) de paysage à base de nourriture que lui ont rappelé les posts sur les métiers de bouche. En effet, le jeu sur les signifiants/signifiés est ici particulièrement mis en évidence... Je pourrais en faire des supports pédagogiques intéressant pour l'année prochaine.

blogs à lire


Je voudrais ici remercier Rémy Baudoin qui a très rapidement relayé mon invitation aux "ifradiens" sur son propre blog parixicité formation dont j'ajoute aussi le lien à la liste pédagogique. Allez donc faire un tour sur cette mine d'informations ciblées : il y a de quoi réfléchir. A lire aussi une initiative intéressante dont Rémy fait parti, il s'agit du blog des formateurs de la promotion 2007/2008 du DURF, Diplôme Universitaire de la Formation Continue, formation de niveau master délivrée par le Cufco (Centre Universitaire de Formation Continue) d’Angers crée à l'occasion d'un voyage d'étude à Bristol. Décidemment cela vient renforcer ma conviction de la richesse d'un outil pareil en pédagogie quelque soit le niveau concerné.

Précision pour les lecteurs de blogs débutants : quand les mots d'un post (article) sont dans une couleur différente c'est qu'il sont un lien vers un autre site ou blog donc pour y accéder directement, cliquez sur ces mots colorés.

l'écoute du regard?




A mon intervention du mois dernier "Développer sa créativité dans son quotidien professionnel" à l'ISM auprès de salariés du groupe PRISMA PRESSE, une première m'attendait. Anne, l'une des stagiaires, était accompagnée de deux traductrices. Elles étaient deux parce que le langage des signes, c'est plus sportifs que les langues étrangères! Merci donc à Cynthia et Delphine de l'association ARIS d'avoir assuré ces deux journées, pleines de mes gros mots pédagogiques et d'expressions fleuries.

En effet, Anne est sourde mais pas muette puisqu'elle parvient fort bien a se faire comprendre (même sans les traductrices, cependant nécessaires pour les termes techniques et la rapidité de compréhension) pour peu que l'on soit attentif. Et c'est ça qui a été formidable : la simple présence du temps de décalage nécessaire à la traduction, nous a tous amené à davantage travailler notre qualité d'écoute. J'ai pu observer que même dans les sous groupesAnne n'était pas, l'attention à la parole de l'autre, à ne pas tous parler en même temps et à laisser chacun s'exprimer, s'est "naturellement" accrue.

En ce qui me concerne, les premières minutes on été troublantes : avoir une personne qui bouge à coté de vous pendant que vous vous exprimez et que tous le monde regarde alors que c'est vous qui parlez, ça fait bizarre. Puis finalement, je m'y suis faite rapidement tout comme les autres apprenants qui finirent par me regarder pour suivre la formation. Je me suis aussi rendu compte de l'importance de ce regard dans ma façon d'animer. J'avais besoin d'attendre celui d'Anne pour vérifier qu'elle suivait au delà des simples commentaires. Je n'avais pas réalisé à quel point j'ai besoin de ce feed-back dans le tempo de ma progression pédagogique.

Ah, que la différence est enrichissante pour apprendre sur l'autre et sur soi-même! C'est une évidence un peu gnangnan que j'énonce là, mais de la vivre c'est encore bien autre chose.

vendredi 5 décembre 2008

amis ifradiens

promo 13

« Ifradiens », cela ne vous dit peut-être rien, mais pour tous ceux qui sont passés par la formation de formateur, d’abord à Pédagogie-A devenue ensuite IFRADE sur Nantes puis aujourd’hui Maison de l’Initiative intégrée à l’UCO d’Angers, ce terme représente une aventure humaine particulière de 9 mois (tiens, tiens). 18 ans que l’odyssée durait, chapeautée par des équipes évoluant mais gardant un même état d’esprit à travers des partis pris pédagogiques forts et pas si courant dans le milieu de la formation. J’étais de la promo 13 puis membre de l’équipe.
Cette année, l’histoire n’a pas repris, faute de candidats financés notamment. Cependant, il me semble, que chaque formateur passé par là, est plus ou moins marqué dans son action de tous les jours par les sens de la méthode active, des situation problèmes, des interrogations de posture du formateur, de la métacognition, de la prise en compte des représentations initiales, de l’importance de l’évaluation formative, etc. Même si le quotidien nous rattrape tous, les valeurs demeurent. Il nous reste les réflexes de questionnement de nos pratiques, l’apport des échanges entre collègues et parfois même le besoin de vider son sac. Tout cela, d’un point de vue personnel et depuis quelque temps déjà, m’a poussé à construire ce blog. Alors, je vous invite, amis « ifradiens », si le cœur vous en dit, à venir, par vos commentaires, alimenter cet esprit et poursuivre nos discussions riches et animées, s’interroger ensemble sur des points précis, partager nos expériences et solliciter l’avis des autres… Ce blog est aussi une vitrine, donc n’hésitez pas à m’envoyer vos informations que je relaierai avec plaisir.
Ce réseau ifradien n’est pas fermé sur lui-même, aussi, lecteurs d’autres réseaux êtes-vous les bienvenus et même attendus pour enrichir nos réflexions.

mercredi 3 décembre 2008

métiers de bouche et créativité

La dernière journée du module "Valoriser les produits des métiers de bouche par la créativité" animée à la CMA (Cf. contexte décrit dans le post "de l'expérience du collage au concept signifiant/signifié") est consacrée à l'élaboration d'un projet le matin et à sa présentation devant un "jury" l'après-midi. Bruno Veslin, le responsable pédagogique, ainsi que les formateurs "techniques" Maurice, en boulangerie, et Julia, en pâtisserie, ont bien voulu jouer le jeu, qu'ils en soient ici remerciés.

Chaque apprenant élabore une démarche particulière dans sa globalité grâce aux notions abordées les jours précédents. Les productions entrent dans le cadre de deux sujets aux choix : le partenariat de la boutique "virtuelle"(qu'ils auront un jour ou dans laquelle ils travailleront un jour...) avec la ville autour d'un évènement artistique ou les premières étapes de leur projet (réel celui-ci) de création d'entreprise à venir.

Voici les traces des productions de cette année :

Damien, boulanger, propose pour le buffet du vernissage de l'exposition du musée de la faïencerie de sa ville, des pains décorés reprenant l'iconographie traditionnelle des pièces exposées ainsi que des pains "à saucer" prenant la forme des personnages typiques réalisés grâce à un emporte-pièce dont on voit ici la maquette.


Olivia, en pâtisserie, a pensé la décoration d'un entremet citron/passion à l'image d'un tableau de Kandinsky et dont la boite reprendrait le motif.



Naoual, en boucherie, a organisé sa vitrine en fonction de la mise en valeur des couleurs des différentes viandes.





Magali, en boulangerie, a réfléchi a un ensemble de décors thématiques réalisé en pâte à pain coloré destiné à la vitrine.




Kevin, en boulangerie, propose une boutique concept autour du thème de la piraterie, reprenant la remarque du groupe, la journée précédente, sur sa recherche de logo plus proche de la taverne que de la boulangerie. Une réactivité en forme de délire bienvenue et offrant au jury des pistes de réflexions à exploiter, tout à fait sérieuses, elles.



Jérôme, en boulangerie, s'est éclaté sur un décor de pain tout droit inspiré du peintre Alain Thomas.



Ingrid, en pâtisserie, a travailler sur un gâteau "Calder" tant dans sa recherche formelle que sur le code couleur en adéquation avec le choix des produits utilisés (chocolat, fil de sucre...).



Hadrien, en boucherie, a dessiner un mobile, entrant ainsi dans une réflexion issue de la première journée de ce module où les bouchers ont été amené à regarder différemment leur métier à travers les yeux d'artistes comme Natacha Lesueur par exemple.



Emmanuel, faisant un mixage des deux sujets, propose un emballage pour une pâtisserie de nuit "A la bonne étoile" avec une fenêtre ouverte sur le produit tout en travaillant une esthétique en lien avec les oeuvres de Buren.




Philippe, en boulangerie, exploite la simplicité des formes des Futuristes russes pour mettre en valeur les caractéristiques du pain.



Vincent, en boulangerie, mène toute une réflexion sur l'évènement "l'art entre dans la ville" en proposant notamment un packaging qui détourne des classiques picturaux en y glissant des viennoiseries de manière judicieuse. Ici, un Picasso où s'est glissé un croissant comme si il avait toujours été là. Sa démarche très complète allait jusqu'à décrire un jeu concours de dessin pour les enfants avec exposition dans la boulangerie et récompense à la clef.



Ici, la réflexion de Guillaume sur un code couleur encore peu utilisé en boulangerie et pourtant judicieux. Son travail a porté sur une signalétique extérieure liée à l'événementiel sous forme de kakémonos (bandes de tissus/papier suspendues verticalement à un support et lestées dans le bas).

















Fatima a conçu un mapping pour sa future pâtisserie marocaine (et pas "orientale") ainsi qu'une réflexion sur son logo. Elle exerçait déjà son activité sur les marchés avec des recettes traditionnelles revisitées qui lui viennent de sa maman et qui sont tout à fait succulentes (chanceux, nous les avons goûtées le jour même, merci Fatima!). Elles ont pu être dégustées à l'inauguration du hammam du LU que les nantais connaissent.


















Eric a pensé son dessert de mousses glacées dans un contenant en chocolat en feuilletant une documentation sur Escher. Il s'en est d'ailleurs inspiré pour travailler l'illustration de sa boite.

















Christophe, tout à son projet de boulangerie en Thaïlande, a réfléchi à son identité visuelle devant évoquer la France et la tradition. Ici, le graphisme d'un packaging. Sa présentation comportait aussi une boite à viennoiserie en losange pouvant se décliner pour une enseigne lumineuse de type "lanterne" reprenant le même code couleur.























Anne-Gaelle, en pâtisserie, compte développer son activité d'apicultrice par la production de gâteaux secs. Voici sa proposition d'un présentoir où l'idée de chaleur et de tradition bretonne ont été au centre de sa réflexion.





















Alexis est parti sur l'identité de sa pâtisserie où ses créations seront mises en valeur par un logo "signature" et une boutique aux accents italiens dont l'aménagement a été pensé autour de la dégustation sur place accompagnée d'un petit café, d'où la trace ronde sur le visuel.




Évidemment, ils ne s'agissait pas de former des designers en une semaine mais d'amener une réflexion globale autour d'une activité ciblée. L'objectif étant de sensibiliser les participants a ces approches afin pouvoir construire une démarche cohérente dans son ensemble et dialoguer avec des professionnels qu'ils soient imprimeurs, installateurs, peintres décorateurs, etc.

du résultat plastique à la réflexion pédagogique

Cette année encore, malgré des supports d'inspiration variés dans les styles, les apprenants boulangers de la CMA (Cf. contexte dans le post précédent) sont restés très classiques dans leurs productions de décor. En proposant des illustrations "modernes" autour du thème des oiseaux, j'espérais éveiller un intérêt vers une esthétique plus "contemporaine", partant du principe que tous les "consommateurs potentiels"' de ce genre de commande à leur boulanger ne sont pas des "classiques" et qu'il se peut que cette clientèle "aisée" puisse être attirée par un autre univers.

Est-ce la notion de tradition chère à ces futurs boulangers qui les retient? Est-ce que leurs représentations "artistiques" liées à cette activité ne sont pas assez chamboulées par ma consigne ? Est-ce uniquement mon goût personnel de cliente potentielle lassée par les décors classiques qui m'influence ? Que de questions pédagogiques soulevées par des productions : anticipations des représentations initiales des apprenants, construction de l'activité, rédaction de la consigne, posture du formateur... Chaque année ré interrogées, chaque année affinées, ces questions sont mon carburant. L'année prochaine, j'organiserai ma consigne différemment!

de l'expérience du collage au concept signifiant/signifié

Lors du module d'une semaine "Valoriser les produits des métiers de bouche par la créativité" (animée dans le cadre de la formation continue de la Chambre des Métiers et de l'Artisanat de Loire-Atlantique à Sainte-Luce destinée aux adultes pour les CAP Boucher, Pâtissier et Boulanger), je demande aux participants de réaliser un collage permettant de faire deviner un goût sans le nommer et sans utiliser d'images directement descriptives (signifiants). Il s'agit pour moi d'aborder les notions de signifiant/signifié sans trop entrer dans des considérations théoriques rébarbatives.

Les métiers de bouche sont directement concernés par ce concept à travers leurs communications, lieu de vente et leurs produits mêmes. Comprendre, dès ce stade d'apprentissage du métier, que la maîtrise du savoir-faire technique de production ne fait pas tout dans le succès d'une telle activité, passe pour moi, par cette étape.

Pour transformer cette notion complexe en expérience accessible, le jeu de la "devinette" est un outil formidable : par la pratique de la contrainte de représentation de sensations, donc éloignée d'éléments tangibles a priori, l'apprentissage du décalage entre ce que l'on veut dire et ce que les autres perçoivent, apparaît de façon flagrante et difficilement contestable par les apprenants. Ainsi la suite du module, concernant les choix "esthétiques" liés à ces métiers, est perçue comme un ensemble de solutions pour limiter les interprétations hasardeuses et non voulues de leurs futurs clients vis à vis de leurs future boutique (pour ces entrepreneurs en devenir) ou de leurs employeurs (pour les salariés qu'ils sont déjà en alternance). L'importance de guider au maximum le message implicite de son travail devient le fil rouge de la semaine et je l'espère une graine semée dans les esprits pour plus tard.

Voici quelques exemples réalisés le 3 novembre dernier :

Kevin, en boulangerie, décrit ici la badiane.


Voici la production de Vincent, aussi en boulangerie, qui représente la cannelle.



Magali, en pâtisserie, joue avec le praliné.


Puis, en forme de clin d'oeil, Hadrien en boucherie, construit du signifiant sur le thème du goût du sang, en dehors de la consigne (puisqu'il utilise du figuratif au premier degré) mais me permet ainsi d'illustrer, auprès du groupe, les notions d'interprétations possibles liées aux référents de chacun et à l'imaginaire collectif, notions abstraites et ambiguës qui prennent ici tout leur sens auprès de ce public pas toujours aussi ouvert à ce type de réflexion complexe.